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| Poor unfortunate souls, in pain, in need || Stefan & Evgeni | |
| ♔ DURA LEX SED LEX HOMINUM REVELIO ϟ Statut du sang : MêléMessages : 59Date d'inscription : 14/03/2018Localisation : bulgarie | Ҩ Poor unfortunate souls, in pain, in need || Stefan & Evgeni Ҩ Mer 8 Aoû 2018 - 0:29 | |
| Ses mains sont moites lorsqu’il pénètre dans l’âtre de la cheminée pour quitter le ministère, ce soir-là. Il ne rentre pas chez lui. Avec un peu de chance, il ne s’éternisera pas là où il va ; s’il avait le choix, il n’y poserait même pas un seul orteil. Mais on ne peut pas exactement refuser une invitation formelle de la part d’Evgeni Velikov. Et sûrement pas quand on s’appelle Stefan Wrzesinski et qu’on ne craint rien tant que de s’attirer les foudres des organisations criminelles. A quel point serait-il facile, pour un homme comme lui, de déterrer son passé oublié ? De faire voler sa vie en éclats ? Il va y aller, écouter ce qu’il a à dire, acquiescer gentiment et rentrer chez lui, retrouver sa fille. Il a pensé à envoyer un message à Leksa, lui demander si elle en a encore fait une, ces derniers temps. Si c’est elle, la responsable de cette convocation - parce qu’il s’agit bien de cela. Convié dans le bureau du maître comme un enfant pris en faute ; alors qu’il n’a rien fait de mal. Et surtout, qu’il n’est plus un enfant. Pourquoi alors a-t-il la boule au ventre comme quand il était gamin et que son père avait quelque chose à lui dire ? Tandis qu’il disparaît puis réapparaît dans le manoir de son hôte, il s’interroge. Fait des liens, évalue les similitudes. Très vite, il comprend que non, c’est différent. Il n’avait plus peur de son père, il savait ce qui allait lui arriver quand il entrait dans le salon, qu’il s’approchait de l’épais fauteuil au tissu crasseux qui dégageait toujours la même odeur de vieux whisky sec. Ca n’allait jamais bien loin, il repartait avec une marque toute neuve et les paupières résolument fermées pour ne pas laisser s’échapper les larmes. Et ça s’arrêtait là, jusqu’à la prochaine fois. L’enjeu est différent aujourd’hui ; il ne craint pas pour sa vie, il n’a pas peur de prendre un coup. C’est bien plus fourbe, plus insidieux. L’homme qu’il s’apprête à affronter est bien différent que celui dont il a craint les cris pendant les premières années de sa vie. En tout cas, il n’a pas écrit à Leksa. Trop peur d’être surveillé, que ça lui retombe dessus. Il n’a pas pris le risque.
Le manoir Velikov est animé. Il a à peine posé le pied sur les dalles de la salle de réception qu’un homme s’approche, élégant et imposant, même face à lui. Tendu, Stefan redresse un peu plus ses épaules ; pas question de se laisser écraser. Pas par ce gorille, en tout cas. « Je viens voir… » commence-t-il, d’une voix rauque ; mais l’autre acquiesce déjà, et il se tait. Visiblement, il est au courant. « Il vous attend. » Le diplomate retient un soupir ; s’il l’attend, alors, c’est parfait. Ca ira vite. Pour autant, il ne peut s’empêcher de frissonner légèrement. Cet homme est tellement important que personne ne se donne la peine de le désigner, ici. Il ne peut s’agir que de lui. Mortellement sérieux, il acquiesce à son tour, laissant son manteau au domestique qui vient le lui réclamer avant d’emboiter le pas à l’homme de main. Son regard traîne le long de la rambarde chichement décorée de l’escalier qu’il est en train de gravir. Le marbre sombre claque sous ses pas, comme un tic tac angoissant. Rares sont les fois où il s’est senti si peu en sécurité, ces dernières années. Ca ne lui plait pas du tout. Pour se rassurer, il pense à Emilia, chez lui, à l’abri. Etrangement, cette image lui noue l’estomac encore un peu plus fort.
On le fait entrer dans un vestibule et on lui dit d’attendre ici ; il ne répond pas, la mine sombre. De toute évidence, il n’a pas le choix. Il survole de son regard soucieux le fauteuil de velours installé près de la fenêtre, sans faire mine de s’en approcher. Le dos raide, il profite de ces quelques secondes de répit pour souffler, apaiser son esprit autant qu’il le peut. Il n’a même pas encore rencontré Evgeni qu’il se sent déjà acculé. Et il aimerait bien pouvoir trouver ça incohérent. Hélas, il a trop conscience des raisons pour lesquelles il a été convoqué ici. L’homme qu’il s’apprête à rejoindre est le premier responsable du fiasco total qu’est devenu sa vie au cours des derniers mois. Indirectement, effectivement ; mais s’il n’y avait pas eu de Bratva ? Jamais Leksa ne se serait lancée dans cette vendetta contre la famille Velikov ; jamais elle n’aurait, pour cela, abandonné époux et fille. Jamais il n’aurait, non-plus, eu à rendre compte de faits dont elle est la seule responsable, de tourments qu’il a toujours cherché à éviter. Pourtant, il avait toujours cru qu’elle pouvait comprendre, Leksa. Que le bonheur est trop précieux, que l’équilibre est trop fragile pour jouer les funambules. On ne s’aventure pas sur la corde quand elle menace de se briser d’un instant à l’autre. On reste sur la plateforme, à l’abri. Ensemble.
Mais pas Leksa, non. C’était sûrement trop facile pour elle, tout ça. Il a fallu qu’elle prenne le risque ; elle a joué, et perdu, mais elle s’acharne. Il a ramassé les morceaux la première fois.
Et aujourd’hui il est là pour éviter de devoir recommencer.
Soudain, la seconde porte du vestibule s’ouvre sur un deuxième garde du corps aussi austère que le premier. Pas un mot, pas même un geste ; il ouvre la porte et il s’efface. Voilà, il y est. Et s’il s’empêche pas principe de prendre une longue inspiration avant de pénétrer dans le bureau, ce n’est pas l’envie qui manque.
L’entrée fait face à l’immense bureau d’ébène sur lequel est penché Evgeni Velikov. Rien ne dépasse. Pas un livre de la bibliothèque, pas une feuille de papier sur les piles de documents formées aux coins de la table. Chaque chose dans cette pièce se tient à une place très précise, exactement où le maître des lieux l’a décidé. Et lui, Stefan, ne fait pas exception. Cette idée lui fait froid dans le dos.
« Evgeni. » le salue-t-il, de la voix la plus claire qu’il puisse prendre en dépit des gravillons qu’il a l’impression d’avoir dans la gorge. « J’ai fait au mieux pour répondre à votre invitation. Le ministère n’est pas facile à quitter, surtout en ce moment. » Une invitation. Ils savent l’un comme l’autre que ce n’en était pas une. A toute vitesse, il réfléchit. Se réprimande intérieurement de n’avoir pas songé plus tôt à une façon de lui demander ce qu’il lui voulait ; aller droit au but sans montrer que sa seule hâte est de décamper d’ici. « Y a-t-il quelque chose que je puisse faire pour vous ? » La formule lui arrache les lèvres ; il a l’amer impression d’être en train de lui lécher les bottes. Comme quoi, quelle que soit la ligne qu’on franchit, aussi haut que l’on s’élève, on finit par tomber sur une nouvelle limite. Un nouveau rapport de force ; c’est incessant. Tant pis, il n’est pas là pour remettre l’ordre du monde en question. Juste pour éviter à sa vie de voler un peu plus en éclats. |
| | | ✝ ABYSSUS ABYSSUM INVOCAT HOMINUM REVELIO ϟ Statut du sang : PurMessages : 11Date d'inscription : 23/02/2018Localisation : Bien au chaud dans son fric. | Ҩ Re: Poor unfortunate souls, in pain, in need || Stefan & Evgeni Ҩ Mer 8 Aoû 2018 - 16:02 | |
| Ses yeux se posent sur le tas de parchemin, un nouveau devoir auquel il ne peut pas se soustraire. Le bureau est silencieux depuis des heures. Malgré le monde peuplant en permanence le manoir Velikov, ils sont peu à oser venir perturber le travail du vieux sorcier en quête de solitude. Les affaires et la famille, c’est à peu près tout ce qui l’intéresse ; ça, et les implorations régulières qu’il adresse sans un mot à Dieu, dans l’espoir de voir ses affaires prospérer et durer encore longtemps. Evgeni n’est pas suffisamment fou pour remettre tout son destin aux mains d’une entité qu’il n’a jamais vue ; mais il connait aussi la valeur de la dévotion, et sait que les grands hommes ont besoin de figures référentes. Il ne connait personne qui soit suffisamment au-dessus de lui pour lui prodiguer conseils et injonctions ; personne, sauf la Voix qu’il entend dans les voix des choristes à chaque fois qu’il actionne d’un coup de baguette le vieux tourne-disques familial. Evgeni n’a jamais aimé la musique moldue, exception faite des classiques tournant en boucle dans l’atmosphère confinée de son cabinet de travail. Assis à son bureau, penché sur une pile de documents, il trie, il compare, il examine. Il veille sur ses affaires comme on s’occuperait d’un chaton en détresse, dans le silence le plus total. Parfois, la musique est trop belle pour qu’il soit capable de rester concentré sur autre chose.
Et aujourd’hui, il a des problèmes à régler. Il n’a jamais beaucoup aimé gérer les conflits, Evgeni, il préfère quand le monde tourne droit sans qu’il ait besoin de mettre un petit coup dans le globe. Il sait que ce n’est pas aussi simple, très loin de là. Il sait que sa main ne peut pas relâcher son emprise sur le sceptre de la Bratva ; pas encore, pas maintenant. Pas tant qu’Echo n’aura pas fini d’apprendre. Et il lui en reste du chemin, à son fils. Il n’y a qu’à voir ce qu’Evgeni est obligé de faire pour le protéger ; il ne tolère aucune menace, qu’elle vienne d’en haut ou d’en bas, du passé ou du présent. Il estime avoir suffisamment d’énergie à dépenser pour se protéger de son propre sang, sans que la vermine se permette des écarts. Il n’a pas le choix, pourtant ; son fils ne lui laisse pas ce loisir. Alors il attend, le vieil homme, comme on regarderait la course de l’eau au bord d’une rivière ; il est patient, méticuleux. Il ne laisse rien au hasard, pas même une simple invitation à l’encontre d’un homme émérite. L’avantage d’être en haut, c’est qu’on ne craint pas la punition.
Mais celui qu’il a convoqué est en bas. Il suffit simplement de le lui rappeler, non ? ça commence comme ça. Une invitation, c’est de cette façon qu’il a formulé sa demande, quand il a envoyé un hibou en direction du ministère. Le message sous-entendait son impatience à l’idée de recevoir Wrzesinski, l’un des chouchous de Mladenov. ça le chagrinerait, presque. Il connait le garçon, et le sait honnête et droit ; mais voilà, dans une vie, il faut savoir choisir ses fréquentations. Et Stefan, en cela, a commis une grave erreur. On donne trois coups discrets à la porte, qui lui font à peine relever la tête. « Entrez. » Sa voix grave et calme résonne dans la pièce, alors que Cvetkov passe à peine la tête dans l’entrebaîllement de la porte. « Monsieur Wrzesinski est arrivé. » « Ah ! Parfait, faites-le entrer. » Son regard se détache momentanément de la pile de documents posés près de lui. Détaché, il n’en lâche pas sa plume pour autant ; il n’a aucune bonne raison de faire comprendre à Stefan qu’il l’attend.
Lorsqu’il entre, Evgeni lève à peine la tête. Ne rien montrer, ne rien laisser transparaître, bien qu’il se doute que Stefan est parfaitement au fait de la raison de sa venue. ça se lit dans son regard, dans sa posture, quand l’homme de la Bratva le fixe, d’abord sans rien dire, attendant les salutations de convenance. « Evgeni. » « Stefan. C’est un plaisir de vous accueillir chez moi. » répond l’homme avec un sourire affable, en se redressant tout à fait, cette fois. Il se lève, quitte l’horizon de son bureau pour s’intéresser enfin à celui qui vient de pénétrer dans la pièce. La porte se ferme. ça résonne comme le glas d’un jugement. « J’ai fait au mieux pour répondre à votre invitation. Le ministère n’est pas facile à quitter, surtout en ce moment. » Il s’en doute, mais il ne lui a pas laissé le choix. Personne ne peut se soustraire à une invitation comme celle-ci ; c’est l’avantage du pouvoir et de l’influence. Evgeni en connait les secrets depuis beaucoup trop longtemps.
Il s’avance, pour atteindre sa hauteur. Une main ferme se tend, et en serre une autre. Moite. Wrzesinski a peur. Et il fait bien. Le sourire du mafieux n’est qu’une cruelle façade. Ni l’un ni l’autre n’est dupe, mais les apparences sont tout de même conservées. Stefan marche sur des oeufs ; Evgeni s’en enorgueillit. « Loin de moi l’idée de vous empêcher de faire votre travail, bien entendu. Je suis profondément navré que cette invitation ait été prise pour une injonction. » Mais n’oublie surtout pas que c’en était une.
« Y a-t-il quelque chose que je puisse faire pour vous ? » Il en a parfaitement conscience. Evgeni retient un petit sourire satisfait, avant de se diriger vers un buffet, au fond de la pièce. Sa main saisit un verre épais, et une carafe de liquide ambré. « Vous êtes bien pressé, mon ami. Prenez donc un verre, nous sommes des gens civilisés n’est-ce pas ? » Son sourire déforme la réalité, il se modèle, Evgeni, comme un Janus à deux facettes, regardant le futur et le passé à la fois, les perspectives, choisissant la meilleure voie. Tranquille, il verse le whisky dans deux verres ; puis se rapproche, et le tend à Stefan avec un sourire. « Je vous en prie, ne restez pas debout. » A son tour il prend place. Récupère les pleins pouvoirs sur son trône de velours rouge.
« Je suis ravi de vous recevoir chez moi. Vous comptez parmi les hommes les plus talentueux de notre ministère. Todor fait bien de vous avoir comme homme de confiance. » Il sait qu’en face, il ne se laissera pas avoir par ce genre de boniments. Mais cela n’a aucune importance, ce n’est pas vraiment comme s’il y avait un enjeu pour lui. « Votre carrière est impressionnante. J’ai toujours eu beaucoup d’estime pour les personnes comme vous sachant garder la tête froide en toutes circonstances. » Son sourire s’élargit, alors qu’il croise les mains devant lui. « Il m’est apparu important de prendre de vos nouvelles. J’ai été… déconcerté par le départ de madame Wrzesinski. Si vous avez besoin de mon aide pour quoi que ce soit, croyez bien que je ferais de mon mieux. » Le piège se referme. Doucement. Bien sûr que c’était de ça, dont il voulait parler. « Le coeur des femmes est un océan de mystères, n’est-ce pas ? »
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| | | ♔ DURA LEX SED LEX HOMINUM REVELIO ϟ Statut du sang : MêléMessages : 59Date d'inscription : 14/03/2018Localisation : bulgarie | Ҩ Re: Poor unfortunate souls, in pain, in need || Stefan & Evgeni Ҩ Sam 18 Aoû 2018 - 16:59 | |
| « Loin de moi l’idée de vous empêcher de faire votre travail, bien entendu. Je suis profondément navré que cette invitation ait été prise pour une injonction. » Un sourire crispé étire ses lèvres ; il a parfaitement conscience de n'avoir eu aucun choix dans cette histoire. Et Evgeni aussi. C'est ce qui est aussi effrayant, avec cet homme ; aussi impressionnant. Savoir que son interlocuteur a toujours un coup d'avance. Qu'il sait où se trouve chacun des pions sur l'échiquier, parce que c'est lui qui les a placés là, dans un but bien précis. Et là où Stefan est habitué à être le joueur de l'autre côté de l'échiquier, aujourd'hui il n'est qu'un fou au milieu du plateau, à la merci de l'adversaire. Alors que peut-il faire, sinon attendre, le dos droit, les poings serrés dans l'attente du coup fatal ? Simplement faire en sorte qu'il arrive vite. Abréger la partie.
« Y a-t-il quelque chose que je puisse faire pour vous ? » Le patron de la mafia est trop tranquille et lui trop tendu ; il sait que ça se voit, il n'est pas assez idiot. La quiétude presque nonchalante de l'homme le pétrifie, et il reste planté à sa place tandis qu'Evgeni se dirige vers le buffet. « Vous êtes bien pressé, mon ami. Prenez donc un verre, nous sommes des gens civilisés n’est-ce pas ? » « Avec plaisir. » grince-t-il, tendu. Accélère un peu, espèce de requin. Il est impressionnant, ce roi ; ne peut s'empêcher de penser le britannique. Là où les autres restent en général bien à l'abri derrière leurs pièces, lui n'hésite pas une seconde à laisser l'adversaire s'avancer juste devant lui. Trop sûr de son immunité ; ça causera peut-être sa perte, se surprend-il à espérer. Mais pas aujourd'hui ; il n'est pas assez naïf pour penser qu'il sera celui qui fera tomber Evgeni de son trône. Un jour, peut-être ; en attendant, il attrape docilement le verre qu'on lui tend. « Je vous en prie, ne restez pas debout. » Sans répondre, Stefan s'installe sur le siège de cuir. Peut-être son hôte se décidera-t-il enfin à lui faire savoir pourquoi il l'a si généreusement invité.
« Je suis ravi de vous recevoir chez moi. Vous comptez parmi les hommes les plus talentueux de notre ministère. Todor fait bien de vous avoir comme homme de confiance. » Où veut-il en venir ? Les compliments ont peut-être leur petit effet auprès des gens comme lui ; ceux de la haute, ceux qui n'ont jamais fait un pas sans que les félicitations ne fusent de toute part. Lui il s'en fout bien, de l'approbation de l'homme le plus dangereux du pays ; à moins que son estime ne le garde à l'abri du danger. Ce dont il doute, puisqu'il est ici aujourd'hui. « Votre carrière est impressionnante. J’ai toujours eu beaucoup d’estime pour les personnes comme vous sachant garder la tête froide en toutes circonstances. » Son sourire a quelque chose de profondément dérangeant ; pour autant, il s'efforce d'y répondre, inclinant respectueusement la tête pour accueillir les compliments. Ne rien faire qui pourrait lui porter préjudice plus tard. « Il m’est apparu important de prendre de vos nouvelles. J’ai été… déconcerté par le départ de madame Wrzesinski. Si vous avez besoin de mon aide pour quoi que ce soit, croyez bien que je ferais de mon mieux. » Malgré lui, Stefan sent tous ses muscles se raidir en un instant. Leksa. Évidemment. Malgré la panique sourde que le mafieux ravive en quelques mots lancés bien trop précisément, le diplomate s'efforce de ne pas bouger d'un cheveu. Garder la tête froide en toute circonstance ; c'est bien le moment de prouver qu'il en est capable. « Le coeur des femmes est un océan de mystères, n’est-ce pas ? » Sombre salopard.
Et qu'est-ce qu'il est supposé faire, maintenant ? Se désolidariser de sa femme, maintenant ? Tenir sa petite fille à l'abri du requin qui se tient en face de lui ? Il ne peut pas faire ça ; pas maintenant, pas comme ça. Evgeni n'a pas parlé d'Emilia, après tout. Aurait-il des scrupules à s'en prendre à une enfant innocente ? Naïvement, il veut soudain croire que oui, Stefan. Il est face à quelqu'un d'intelligent, après tout. Peut-être pas intègre, mais intelligent. Peut-être voudra-t-il bien entendre qu'il n'y est pour rien dans les agissements de sa femme. Qu'il n'a cherché qu'à la convaincre de renoncer à cette vendetta insensée contre Echo, et que pour cette raison, il ne mérite absolument pas qu'on s'en prenne à lui-aussi. Lentement, il cache son sourire incertain derrière le verre de whisky duquel il prend une gorgée. Excellent, se dit-il, avant d'engueuler intérieurement son esprit bien trop prompt à se jeter sur la première chose qui pourrait l'empêcher de voir l'impasse dans laquelle il se trouve. Il pousse un soupir faussement contrit, en répondant d'une voix dont il contrôle les tremblements. « Je ne vous le fais pas dire. » Et maintenant ? Il tenterait bien de faire dévier la conversation, digresser vers autre chose, un sujet moins glissant, moins dangereux. Mais ce serait prendre Evgeni pour un idiot que d'imaginer qu'il pourrait s'en tirer si facilement. La conversation, à l'instar de tout ce qui se passait depuis qu'il avait reçu cette fichue convocation, irait exactement dans la direction que l'autre avait choisie. « Je vous remercie pour votre sollicitude, Evgeni. Son départ était nécessaire, même si je n'ai jamais souhaité en arriver là. » A quel point le Velikov est-il renseigné ? Sait-il que c'est Stefan qui l'a mise dehors, sait-il que sa fille est restée avec lui ? Où veut-il en venir, que cherche-t-il à obtenir? Stefan s'efforce de garder silencieux son souffle de plus en plus haché ; il jette un œil à son verre, dont il voudrait reprendre une gorgée pour passer son tour de parole. Mais Evgeni en attend plus, ça se voit dans la façon qu'il a de le regarder. Air avide de détraqueur ; ne l'a-t-il donc fait venir que pour le torturer ? « Je n'ai besoin que de temps, à présent. Quelles que soient les causes de cette séparation, elle n'en reste pas moins un bouleversement. » Il peut le dire, mais certainement pas le montrer. A quel point ça l'a déchiré, de la faire partir. A quel point ça lui a fait mal, de découvrir qu'elle lui a menti, qu'au final il ne la connaissait pas si bien que ça. Qu'ils ne comptaient pas tant que ça, apparemment. C'est presque comme si elle était morte, la femme qu'il aimait. Presque, parce qu'elle est encore bien là, et qu'à chaque fois qu'il y pense, il ne peut s'empêcher de revoir le futur qu'ils construisaient, avant qu'elle ne saccage tout. « Votre whisky est excellent. » |
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