Statut du sang : sang-pur, mais malheureusement incapable de faire de la magieMessages : 322Date d'inscription : 31/12/2015Localisation : fourrée dans son laboratoire à siphonner des veines sang-noires
Ҩ what is dead may never die || ASPHEVA Ҩ Jeu 12 Avr 2018 - 16:15
what is dead may never die
V. Asphalt Dragonstone & Vespera Blackwood
« Never forget what you are, for surely the world will not. Make it your strength. Then it can never be your weakness. Armour yourself in it, and it will never be used to hurt you. »
Toujours cette démangeaison, cette douleur au creux du bras. Avec la dose qu’elle s’est injecté, elle est douloureusement consciente de son sang qui fait le tour de son corps, comme pour animer sa pauvre carcasse de magie. Elle a l’impression de flotter, d’être dans un corps qui n’est pas vraiment le sien, pas taillé pour elle. Quand Asphalt arrive au hangar désaffecté, elle peine à dissimuler ses tremblements. Toujours pas habituée, malgré les piqûres répétées des aiguilles dans son bras, à la magie qui pulse en elle. Ça lui fait l’effet d’une sale maladie qui la ronge, d’un corps étranger dans son système, un truc qui la bouffe et qui la renforce. Asphalt se souvient du premier sort qu’elle a jeté, du mal qu’elle a eu à le prononcer, à le contenir. Surprise par à quel point ça marchait bien, à quel point ça marchait et que bordel, c’est bien elle qui a fait sortir ce truc de ce bout de bois. Le symbole ultime de la magie, celui auquel elle n’avait jamais eu droit.
Combien de fois dans la journée son esprit quitte-t-il encore son corps ? Combien de fois le silence la prend-il soudain, un peu trop fort ? Un simple clignement d’yeux la ramène dans le noir à Nurmengard, dans l’indifférence et le froid ? Seules les décharges magiques de l’Ox la ramènent à la réalité, encore beaucoup trop de mal à se réveiller. C’est paisible, dans le hangar, songe la Dragonstone. Un endroit où les éclats n’ont pas leur place, où les murmures sont rois, où les échanges se font en une discrète poignée de mains. Elle n’a dit bonjour à personne, s’est installée sans un bruit. Quelques-uns de ses poisons sont déjà partis. A Londres, elle s’en réjouissait, parce que ça voulait enfin dire qu’elle arrivait à faire quelque chose de ses dix doigts, quelque chose de bien, quelque chose d’adéquat. Quelque chose qu’elle n’était manifestement pas. Aujourd’hui c’est comme si plus rien n’était là, plus rien ne signifiait quoi que ce soit. Asphalt se dit que l’iskra a fait d’elle ce pantin à la peau trop délicate, mais au fond, elle sait que ça date d’avant tout ça.
Au marché, le ronronnement des négociations à voix basse la berce, elle rêve aux temps anciens, à qui elle était avant de devenir cette constellation tragique d’iskra et de pathétisme. C’était pas supposé se passer comme ça. Elle relève les yeux juste à temps pour voir le gamin tripoter les fioles. La Dragonstone se lève d’un bond ; il sursaute et enlève sa main comme si on l’avait brûlé, mais ne fuit pas pour autant. Il reste planté là, yeux fixés sur son visage. Il a grandi, le foutu gamin, pourtant elle le reconnaît immédiatement ; quatre années à Nurmengard n’ont pas suffi à annihiler l’amertume qu’il lui a fait gerber. « Qu’est-ce que tu fais là ? » elle gronde, entre ses dents. Rapidement, elle regarde autour d’eux, voir si elle peut distinguer la chevelure rouge caractéristique, mais aucun signe d’elle. « Ma mère ne me laisse pas venir par-là, elle dit que c’est pas bon pour moi. » Asphalt reste silencieuse. Enfant stupide et trop téméraire, il a pas l’air d’avoir l’âge de commencer à se rebeller contre sa mère. A son âge, elle était trop occupée à se plier en quatre pour satisfaire ses parents.
Douloureusement, elle se souvient d'Eva, se dit que ce n’était sûrement pas son cas. Finalement, pas étonnant que le gamin soit comme toi.« Non pas que je m’en soucie, mais t’es juste un gosse, tu sais ce qui pourrait t’arriver si tu restais là ? » Mateo reste silencieux une seconde, puis hausse les épaules, comme si tout ça lui passait bien au-dessus. Intouchable enfant courant au-devant du danger. Onze ans, c’est trop jeune pour être jeté dans la fosse aux lions. Asphalt reste là, un moment, considère Mateo dont les pieds sont fermement ancrés au sol, et qui la contemple comme s’il était venu pour elle. Ne se rappelle-t-il pas de l’enfer que c’était, à Domovoï ? Parce qu’elle, elle n’oublie pas. Quelles forces dans l’univers remettent le monstre auprès d’elle aujourd’hui ? « Je vais te ramener chez toi. » décide-t-elle en soupirant. Elle pourrait le laisser là, le laisser se faire kidnapper au pire. Après tout, c’est pas le sien, merde. Mais il attire l’attention, de de toute manière, elle n’est pas tombée assez bas au point de laisser un enfant seul dans un endroit pareil. Elle ne sait trop bien qu’à cet âge-là, de la solitude, on ne se remet pas.
Il a fallu lutter un peu pour qu’il la guide jusque chez lui. Pas particulièrement pressé de rentrer, il pose des questions auxquelles elle n’a pas de réponse, auxquelles elle ne veut pas répondre. Asphalt veut marcher en silence, remettre l’enfant dans sa boucle temporelle et repartir de son côté cabossé. Ça lui fait presque mal de rentrer dans le Sofia moldu ; ça lui rappelle trop Londres, et combien elle se sentait enfin à sa place là-bas. Trop fatiguée de lutter pour rentrer dans une case, de se trancher dans la chair pour convenir enfin à ce qu’on attendait d’elle. Dans le quartier moldu, elle avait pu être elle-même. Est-ce ça, qu’Eva recherche aujourd’hui ? Ca fait bien longtemps qu’elle n’a pas pensé à elle, que l’iskra a creusé sous les couches et grignoté sa cervelle mais elle sait que l’image de la jeune femme lui est venue, parfois, allongée sur le sol de sa prison, dans le plus grand des silences. Elle est reconnaissante à l’iskra d’effacer ces images-là, alors pourquoi retourne-t-elle vers ces serpents de fumée qui l’enserrent un peu plus fort à chaque fois ?
Mateo ne dit plus un mot à présent, ils sont trop proches de la porte. Il refuse de frapper alors c’est elle qui le fait, presque exaspérée, regrettant instantanément d’être là. Le silence s’éternise jusqu’à ce qu’Eva ouvre la porte. Les secondes s’égrènent, à nouveau. Une, deux, trois. « T’as perdu quelque chose, je crois. » Elle doute qu’Eva ait su pour son évasion ; tout au plus, elle s’en est doutée. Asphalt a le cœur battant, c’est un risque qu’elle prend, de se tenir là, sans trembler. Est-ce que quelque chose a changé depuis toutes ces années ?
(c) DΛNDELION
Vespera Blackwood
Ψ DUM SPIRO SPERO
HOMINUM REVELIO ϟ
Statut du sang : Née MoldueMessages : 233Date d'inscription : 17/11/2015Localisation : Sofia
Ҩ Re: what is dead may never die || ASPHEVA Ҩ Dim 1 Juil 2018 - 22:13
¡Mateo !
Son cri se perd dans le brouillard, se heurte aux autres, plus forts, aux appels au secours et aux hurlements de rage, un embrouillamini de sons et d’images qui lui reviennent brutalement à la gueule, comme si le simple fait d’essayer de les oublier était une insulte à leur existence. Elle se souvient de tout, dans les détails. Elle se souvient des combats dans les rues de la ville, où on ne reconnaissait ni les amis ni les ennemis. On jetait des sorts dans le tas avant de filer se cacher, on se battait jusqu’à tomber, sans qu’aucun ne comprenne qui avait tiré le premier. Elle s’en souvient, d’être sortie vivement de sa tente, d’avoir eu les yeux douloureux de s’être autant écarquillés devant la menace. Elle se souvient de sa première pensée quand ses pas se sont jetés sur la terre pour bondir en avant, éviter les sorts, les attaques, ou ceux, au sol, qui tentaient de lui attraper les jambes pour avoir de l’aide. Où était Mateo. ça l’avait prise à la gorge, violemment, ce besoin de savoir son petit en vie, ça l’avait prise si fort qu’elle n’avait eu peur de rien, la lionne, en se précipitant dans chaque rue pour retrouver sa trace. Quand s’était-il échappé de la tente, elle n’en savait rien, mais au tumulte de la bataille, elle avait rapidement compris à quel point elle était en train de faillir à son devoir de mère. Elle se rappelle, les dents serrées dans ce sommeil étrange, d’avoir eu les poumons brûlants, puis les narines imprégnées de fumée. De fumée.
Vite, vite, courir, sauter par-dessus les corps des blessés, des mourants, des morts, rouler au sol pour échapper à un sort mortel, jeter une dague, la voir se planter, repartir sans se soucier de la récupérer ou non. Ses yeux bougent sous ses paupières closes, ses mains frémissent sur les bras du fauteuil dans lequel elle s’est assoupie. Elle ne veux pas voir, elle voudrait ne plus jamais avoir à regarder ça, mais elle le vit, quand même, pour la centième fois ou plus, elle a arrêté de compter. Son corps se tend, ses muscles se déchirent, son cri de détresse résonne dans le charnier où elle y cherche un petit garçon de six ans.
Ses ongles griffent le vieux velours rouge du fauteuil. Elle s’agite dans son sommeil, Eva, parce qu’elle l’a vu, qu’elle l’a trouvé (¡Mateo!), qu’il est en vie (Ven aquí, te lo ruego…) mais qu’il ne veut pas approcher, terrifié, ses yeux ambrés figés sur le spectre des flammes qui s’approche dangereux d’eux. Elle se souvient de l’avoir attrapé, s’égosillant entre ses bras blancs (¡Mamá!) et d’avoir couru, couru encore, tentant d’échapper au feu dévorant tout sur son passage, son corps enroulé autour de celui de son garçon (tu ne mourras pas ce soir) pour qu’il survive, pour qu’il y échappe, et peu importe ce qui arriverait ensuite…
Son corps bondit sur le dossier du fauteuil, la sueur perle sur son front. Elle voudrait se réveiller de toutes ses forces mais elle peut pas, elle a pas le choix, elle va devoir regarder encore, les corps calcinés, les maisons détruites derrière elle, son bond au-dessus de la falaise pour rejoindre la mer, la morsure ardente des flammes sur sa peau, faisant fondre son visage, puis celle du sel, plus violente encore, son corps tressautant dans l’eau glacée. Son fils, qui l’a sauvée, manifestant pour la première fois son don magique. (no te dejaré morir.)
C’est son cri désarticulé qu’elle pousse qui lui fait ouvrir les yeux, une main plaquée sur la partie brûlée de son visage. D’un seul élan, Eva se redresse, le corps trempé de sueur froide, tremblant d’une peur ancienne qui ne l’a jamais quittée. Son regard hébété fixe un moment le mur face à elle. Elle halète, c’est difficile ce simple geste, respirer, oublier la douleur, serrer les dents, des larmes de souffrance plein les yeux. ça ne guérira jamais, elle n’a pas eu les soins dont elle avait cruellement manqué, il n’y a que l’Iskra qui marche. Elle regarde la fiole près d’elle, avec un mélange subtil de dégoût, de peur, et de soulagement. La drogue lui fait oublier ses mauvais rêves, mais quand elle n’en prend plus, ils reviennent. Seulement des cauchemars, Eva. Ses yeux errent dans le minuscule salon de son appartement. Il n’y a rien de sorcier ici, absolument rien sinon la chambre de son fils, jonchée de grimoires, de parchemins. Elle n’a rien gardé de cette époque, que les maigres contacts trouvés sur le tas, à Sofia. Pour la drogue, et seulement la drogue, peu importe le prix, elle ne veut plus avoir mal. La douleur s’estompe, lentement, et elle frissonne, les dents serrées à en avoir mal. Ce n’est que lorsque ses esprits lui reviennent, doucement, que son regard se pose sur l’horloge accrochée au mur, face à elle. Il est en retard.
Eva se redresse, d’un bond, cherchant dans un un réflexe son violon des yeux, son archet. Elle ne trouve rien et s’insulte mentalement, de ne pas avoir eu l’intelligence de se racheter une baguette, de tenter de nouveau d’avoir de la force. Comment peut-elle faire pour protéger son fils, maintenant que sa vie entière est détruite ? Elle tourne en rond, comme une chatte enragée, les mains sur le visage. L’angoisse vient de la prendre aux tripes, elle s’est endormie, il a une heure de retard. Une heure, putain, comment peut-elle être aussi conne, comment a-t-elle pu accepter de le laisser rentrer tout seul, comment a-t-elle pu écouter ce plaidoyer en faveur de l’indépendance, alors qu’il n’est qu’un enfant ?!
Elle s’apprête à sortir, quand elle entend les trois coups à la porte. Elle s’immobilise, raidie, une main posée sur son poignard accroché à la ceinture. Les dents serrées, elle fonce en direction de l’entrée, priant pour que personne ne lui apporte de mauvaises nouvelles, ou le cadavre de son petit. La lionne ouvre la porte en grand, les yeux écarquillés. Et s’immobilise immédiatement. Un silence, un mutisme. Elle n’est pas capable de fermer la bouche mais pas capable de parler non plus, quand la maigre silhouette de la Dragonstone lui fait face, et qu’elle en aurait presque bégayé. Son regard apeuré se fige, et s’efface lorsqu’elle tourne la tête pour observer les yeux clairs et défiants de son fils. Sale petit con, tu perds absolument rien pour attendre.« T’as perdu quelque chose, je crois. » Elle aurait dû se douter que ça la rattraperait, tôt ou tard. Asphalt a toujours été le fantôme hantant son ombre, l’animal de compagnie d’une chimère dont elle a serré si souvent les bras de fumée. Cette fille ne vaut rien, mais elle a une capacité étrange à la survie. Bien plus qu’elle, en tout cas. Elle, elle est entière.
Elle ne répond rien, d’abord. Elle se contente de la dévisager sans retenue, de fixer de son oeil valide la mince carrure de la cracmolle. Elle se demande comment elle a pu s’évader. Quelque chose lui dit qu’elle veut pas savoir, qu’elle s’en fout. Une autre partie d’elle brûle de savoir s’il est toujours en vie, s’il est toujours là. S’il l’a oubliée. Puis elle se remet. Si elle les a tous effacés de sa vie, c’est pas pour rien. Son regard se porte vers l’enfant ingrat et stupide qui ne l’a pas lâchée des yeux. C’est dans leur langue qu’elle s’adresse à lui. “Et on peut savoir ce que tu foutais pour avoir une heure de retard ?” Le gamin se redresse. Elle lève le menton, défiante. “Tu vas me faire le récit détaillé tout à l’heure. Tu dégages dans ta chambre avant que je t’y amène moi-même.” Il réfléchit, elle le lit dans ses yeux d’ambre, les yeux de son père. Il pèse le pour et le contre. Mais contrairement à Lancelot, Mateo a une cervelle. Les mains dans les poches, il dépasse les deux femmes ; il s’éloigne à grands pas, traversant le couloir de l’appartement. Quand la porte claque, elle daigne enfin reposer ses yeux sur la créature de malheur qui n’a pas bougé.
“J’imagine que pour la livraison, je peux au moins t’offrir un verre. Entre.” Elle bouge pas, la Dragonstone, et ça l’agace. Elle veut des réponses. Elle se rend compte qu’elle ne la laissera pas partir sans en avoir. “C’était pas vraiment une question. Tu n’auras qu’à me raconter où tu as trouvé ce petit imbécile, pour commencer.” Ensuite, elles verront. Elle tourne la tête, et les mèches de cheveux qui cachaient la moitié de son visage glissent alors qu’elle lui fait signe de passer l’entrée. Sa peau fondue se dévoile, témoignant d’un souvenir qu’elle ne pourrait jamais perdre, même en le voulant de toutes ses forces. Je ne vous ai pas oubliés.
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